Démission du directeur financier d’EDF pour cause de désaccord sur la décision de construire des EPR en Grande Bretagne. L’action EDF en chute libre. Un chantier à Flamanville qui s’éternise comme une nuit sans fin. Le constructeur des cuves de réacteur à l’agonie. Des voisins allemands et suisses qui s’inquiètent des centrales frontalières. Les allers et retours multiples et insensés (sans sens) de la Ministre de l’environnement et de l’énergie sur la durée de vie des centrales nucléaires et sur la fermeture ou pas de Fessenheim. L’incohérence de l’Etat-actionnaire : programme travaux post Fukushima, durée de vie, tarifs électricité, reprise d’Areva…..
Qui va sonner la fin de la récréation ?
L’impuissance du politique
Le sujet de l’énergie révèle une forme d’impuissance du politique. Allers-retours. Des groupes de travail, des commissions, des débats… à droite et à gauche. Une loi votée à grand renfort de consultations, d’accompagnements médiatiques. L’énergie est depuis 1981 (http://ledesirdepenser.com/a-propos-dorganisation-industrielle/), un sujet politique au sens d’un enjeu électoral. Depuis les premiers pas de l’alternance droite/gauche, nous avons plongé dans l’ambiguité sur les choix industriels et économiques en matière d’énergie. Louvoiements et promesses au détriment d’une révision étayée des choix et d’une redéfinition des orientations de long terme.
Les espoirs des opposants au nucléaire de voir prises en compte les approches écologiques et environnementales sont régulièrement déçus. Les adeptes du nucléaire et de la croissance sont désappointés. Ambiguités. Décisions floues. Manque de courage. La loi transition énergétique votée en 2014 est révélatrice à cet égard : contradictions, chiffres incohérents par rapport aux promesses, des décisions sans financement, ….c’est un vrai jeu de bento. Elle prévoyait un système de prévision pluri-annuelle de l’énergie (PPE) qui ne concerne pas les pétroliers ! et qui avorte eu premier exercice comme le décrit NucleoNics week du 10 mars dernier.
NucleoNics Week MarcH 10, 2016 Meeting on French energy plan delayed The French energy ministry has indefinitely delayed the first meeting on the country’s multi-year energy plan that will set the practical steps to reduce nuclear energy’s share in electricity production, according to documents obtained by Platts. The meeting to set the preliminary terms of the multi-year national energy plan, known by its initials in French as PPE, had been initially set for March 8 but the energy ministry, in a letter March 4 obtained by Platts, said the meeting would be postponed to allow for “further work” and would be rescheduled “as soon as possible.” The PPE is part of France’s energy transition law and aims to change France’s energy mix. The new law, approved during the summer, aims to reduce the share of nuclear energy in power production to 50% and to cap capacity at the current level of 63,200 MW, promoting renewable energy use in its place. Nuclear power generation currently represents 75%-80% of France’s total electricity generation. The energy ministry said in the letter that finalizing the different “complex” scenarios |
and hypotheses of the PPE took “longer than initially expected,” adding that the technical work required to launch the plan still required more time. EDF CEO Jean-Bernard Levy and CFO Thomas Piquemal warned that the French utility needed visibility on French electricity policies, notably on the PPE, in order to make the future investments to maintain the long-term operation of its nuclear fleet (NW, 18 Feb, 1). France’s official court of auditors, the Cour des Comptes, said February 10 in its annual report that the energy transition law could challenge some of EDF’s investment assumptions and force the utility to close a third of its reactors. However, two pages of a document that was to be discussed at the cancelled PPE meeting, also obtained by Platts, show that the energy ministry said it was necessary to “initiate the investments” necessary to prepare for the lifetime extension of 25 GW of nuclear capacity during the first PPE set for 2016 to 2018. The documents also show that the energy ministry said it was necessary to initiate the development of an “optimized reactor,” based on the EPR, in order to make future investment decisions during the second PPE, set for 2019 to 2023. Finally, the energy ministry said in the two-page document that it was necessary to “maintain the closed nuclear fuel cycle.” France chose a closed fuel cycle for its nuclear fleet, meaning it has chosen to reprocess the country’s nuclear spent fuel. decision to delay ‘political,’ consultant says, Yves Marignac, director of the consulting company WISE-Paris, said in an interview March 8 that the delay to the PPE discussion was political and not technical as suggested by the energy ministry. He said that some French environmentalists had judged the initial document “unacceptable” since it provided for the lifetime extension of more than 40% of the nuclear fleet, allowed investments in a new reactor design and maintained France’s closed nuclear fuel cycle. Cyrille Cormier, climate and energy campaigner at Greenpeace, said in an interview March 8 that the PPE document had been leaked before the March 8 meeting and that its content had prompted complaints from some stakeholders that there was “no the path to reducing the share of nuclear energy.” Cormier said that Energy Minister Segolene Royal had to “publicly back her law,” which he said meant closing reactors to allow for additional renewable capacity. The transition law aims to increase renewable capacity to 40% by 2030. The PPE has already been delayed twice this year, according to Cormier. The committee of the PPE is made up of representatives of industrial companies such as EDF, politicians, non-governmental organizations such as Greenpeace as well as various labor unions. The energy ministry did not say when it would plan another PPE meeting. According to the PPE document, however, EDF will need to retire |
www.platts.com NUCLEAR |
Dialogue de sourds. Impossibilité de mettre en oeuvre la loi fraîchement votée.
Les politiques pavanent à la COP 21. Les ingénieurs d’EDF continuent à y croire. Heureusement d’ailleurs car cette ambiance est peu compatible avec la sérénité et la confiance que les « exploitants » des réacteurs sont en droit d’attendre compte-tenu de leur responsabilité.
Repenser le nucléaire dans la politique énergétique et industrielle de la France
Beaucoup d’acteurs de l’industrie nucléaire et de l’administration concernée demandent à repenser la politique énergétique et l’organisation industrielle du nucléaire dans la durée, avec des priorisations notamment pour les investissements.
L’idée d’un décalage de l’engagement des chantiers EPR en Grande-Bretagne exprimée par plusieurs syndicats et par des dirigeants de l’électricien, permettrait de desserrer l’étau financier dans lequel EDF se trouve. Les arguments financiers ne sont pas les seuls. Il parait indispensable au vu des chantiers EPR en cours, de toutes les difficultés et atermoiements rencontrés, d’optimiser le modèle EPR pour le simplifier en prenant en compte le retour d’expérience de ces chantiers. Tout en mettant à niveau les capacités de production d’Areva et en reconfigurant une ingénierie de qualité à partir des équipes d’Areva et de celles d’EDF.
Il semble logique aussi que les 55 millards d’investissement post Fukushima soient assortis d’une visibilité sur la durée de vie des réacteurs, en les justifiant sur 2×10 ans par exemple à l’image des réacteurs identiques ailleurs.
Sans oublier les opérations de grand carénage d’ores et déjà programmées.
Une logique à repenser, à expliquer et à soutenir dans la durée
Personne ne peut comprendre comment toutes ces opérations industrielles lourdes peuvent être engagées, sans priorisation, sans redéfinition du tissu industriel et des compétences, sans engagements de long terme.
Personne ne peut comprendre comment l’actionnaire d’EDF n’est pas plus exigeant en matière de cohérence entre les orientations, les investissements, leur faisabilité……et continue par ailleurs à bloquer depuis plus de 20 ans le prix de l’électricité. Ces incohérences fragilisent toutes les entreprises concernées, freinent les engagements des unes et des autres pour développer les compétences et les moyens techniques indispensables pour faire face à chacun de ces défis.
C’est aussi une pénalisation à terme pour les consommateurs qui seront inévitablement confrontés à la réalité du prix de l’électricité sur leur facture.
Se donner l’ambition collective et individuelle de relever le pari du climat
La logique des engagements pris à Kyoto et renouvelés à la COP21, conduisent aussi à rechercher une accord pour une taxe CO2 montant à 50 €/t pour respecter les engagements de réduction des émissions de carbone.
La dynamique en matière d’énergie est l’affaire de tous les pays industrialisés et des pays qui constituent l’Europe. Aucun ne réussira seul à atteindre les objectifs de réduction des émissions de carbone, d’alimentation en électricité fiable, sûre, respectueuse de l’environnement et disponible pour une société en pleine transformation numérique, industrielle et culturelle.
L’obscurantisme n’est plus de mise, avancer et évaluer le chemin parcouru
Quoiqu’il en soit des débats sur « croissance ou pas », sur la stratégie d’alimentation en énergie de ce pays dans la durée et les conditions acceptées et acceptables en risque, en coût pour le consommateur et en respect des objectifs de la COP 21, il n’est plus possible de continuer à louvoyer.
Les premières décisions prises la semaine dernière par le gouvernement de recapitaliser d’EDF, de renoncement à ses dividendes pour cette année, l’effort d’économie d’1 milliard d’euros demandés à EDF sont des premiers pas qui créent les conditions pour que celle-ci engage sa révolution interne pour aller vers un autre modèle d’entreprise de service public plus adapté à la transition inéluctable du secteur de l’énergie. Si elle veut retrouver son rôle de « leader » et surtout la confiance des français.